En seize ans de pouvoir, la chancelière allemande a vu défiler quatre présidents français, sept chefs de gouvernement et une palanquée de ministres. A quelques semaines de son départ, ceux qui l’ont approchée de ce côté-ci du Rhin racontent cette femme puissante, et font son bilan.

Par Nathalie Funès et Sophie Fay Publié le 19 septembre 2021 

Cela se voulait une séance d’apprentissage. Tout impressionne dans cet hôtel du XIX^e siècle, devenu la préfecture des Yvelines : le château de Versailles à deux pas, la cour pavée, les lustres de cristal, les plats raffinés et les vins grands crus. A la table, dans le rôle de l’« élève », Angela Merkel, 51 ans, la toute nouvelle chancelière allemande, débarquée en politique quinze ans plus tôt, une quasi-inconnue du grand public de ce côté-ci du Rhin. Autant dire une gamine. A la place du « professeur », Jacques Chirac, 73 ans, installé depuis une décennie à l’Elysée, un demi-siècle d’expérience politique au compteur, célèbre partout dans le monde pour s’être opposé à la guerre en Irak voulue par les Américains en 2003. Un vieux briscard des affaires de la planète.Après Angela Merkel, la peur du vide en Allemagne

En ce début d’année 2006, les deux leaders dînent ensemble. Angela Merkel revient d’une visite à Moscou, où elle a eu l’outrecuidance de rencontrer l’opposition. Histoire d’exprimer l’ampleur de sa contrariété, Vladimir Poutine, le président russe, l’a accueillie avec un chien en peluche, alors qu’il est notoire que la chancelière, mordue quelques années auparavant, déteste cet animal. Jacques Chirac, qui lui fera le baisemain toute sa vie, croit bon lui prodiguer quelques conseils pour qu’elle sache mieux aborder Vladimir Poutine la prochaine fois :« Vous savez, Angela, je le connais bien, il est très susceptible. »

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