Président du Forum mondial de la mer, ancien directeur général de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et commissaire européen au commerce, Pascal Lamy a participé à Tanger au Blue Africa Summit qui s’est tenu du 16 au 18 novembre. L’ancienne figure de l’OMC défend ici la nécessité de la préservation des océans et livre son avis sur le développement du Maroc et les défis qui l’attendent.
L’Economiste: Les océans sont une source de richesse pour les populations qu’ils baignent, comment peut-on allier exploitation rationnelle et préservation des ressources?
Pascal Lamy : Si nous voulons traiter la problématique de manière naturelle, il faut identifier de nouveaux équilibres entre l’exploitation de ces ressources fondamentales pour les populations et le fait de ne pas trop prélever. Il s’agit de revenir, en gros, aux pratiques traditionnelles de pêche, comme dans certaines côtes africaines et pacifiques. La plupart des traditions des pêcheurs prônent la pêche durable. En réalité, les véritables responsables de la surexploitation sont les grands chalutiers, les usines flottantes. D’où le besoin d’une régulation internationale beaucoup plus forte de la pêche côtière. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle j’avais pris l’initiative de démarrer des négociations sur les subventions à la pêche à l’OMC, lorsque j’étais commissaire européen.
Vous êtes co-président du groupe de stratégie Afrique-Europe sur la gouvernance des océans, comment peut-on justement assurer une gouvernance juste et efficiente de ces étendues marines?
Le groupe océan de l’Europe-Afrique travaille sur des partenariats entre les deux continents. L’idée est que chaque continent peut apprendre de l’autre. Nous nous démarquons de la problématique de l’aide financière européenne pour la contribution au développement. Nous travaillons sur des actions très concrètes pour un partage d’expériences mutuel en matière de pêche soutenable.
Sur la gouvernance, il existe un problème considérable: elle est trop éclatée.
Il y a des organes de gouvernance pour les ressources halieutiques, pour le transport maritime, pour l’exploitation des grands fonds, etc. Nous étions nombreux à nous demander dans le temps à ce que ce soit beaucoup mieux coordonné à l’ONU. Ce que nous essayons de réaliser du côté de la fondation, ce sont des partenariats concrets pour ensuite bâtir des positions communes sur de grands sujets.